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Risque de blanchiment de capitaux : quels sont les critères d’alerte ?


Cédric Boutteville

Dépôts d'espèces inhabituels, cumul de fonctions dirigeantes, flux inter-sociétés sans motif économique réel... Selon un rapport de Tracfin, plusieurs éléments doivent attirer l'attention des experts-comptables et des commissaires aux comptes qui soupçonnent des cas de fraude fiscale, de manipulation de comptabilité, d'abus de biens sociaux ou encore de banqueroute.



Les professionnels du chiffre sont confrontés à de multiples situations – chez leurs clients – présentant des risques de blanchiment de capitaux et/ou de financement du terrorisme (BC-FT). Tracfin a identifié des critères d’alerte sur plusieurs cas types auxquels sont le plus souvent exposés les professionnels assujettis aux obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement de terrorisme, dont les experts-comptables et les commissaires aux comptes.

Dans le 3e tome de son rapport annuel 2022  publié mardi dernier, le service de renseignement de Bercy a exploité et analysé, entre autres (*), les déclarations de soupçons qui lui ont été transmises.

En 2022, les experts-comptables et les commissaires aux comptes ont établi, respectivement, 676 et 105 signalements.
 
  • Fraude fiscale : flux financiers incohérents et dépôts d'espèces inhabituels
Ces signalements portent notamment sur des soupçons de fraude fiscale. En particulier, les "dissimulations de revenus par l’intermédiaire de structures étrangères et d’une convention de prestation de services", indique Tracfin.

Comment les reconnaître ? Par la présence de "flux financiers incohérents avec les revenus renseignés par la relation d’affaires", des "dépôts d’espèces inhabituels", l’absence de justification de la provenance des fonds, ou encore des "comptes ou sociétés domiciliés dans des juridictions à risque en terme de BC-FT ou bénéficiant de régimes fiscaux avantageux". Certains secteurs d’activités tels que l’hôtellerie et la restauration sont également plus vulnérables aux risques BC-FT.
 
  • Manipulation comptable dans des secteurs qui recourent fortement aux espèces
La manipulation de comptabilité est une autre pratique rencontrée par les experts-comptables et les Cac. Elle "recouvre un large champ d’infractions : délit de présentation ou publication des comptes annuels ne donnant pas une image fidèle de la situation financière et patrimoniale de la société, tenue d’une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière, tenue d’une comptabilité fictive, etc.", détaille le rapport. Qui prend comme exemple la manipulation de la comptabilité d’une société en vue d’éviter sa mise en liquidation judiciaire.

Dans ce cas précis, plusieurs critères doivent alerter les professionnels : des "flux entre des sociétés dirigées par le même individu", la présence de conventions réglementées, ou encore des secteurs d’activité à risque avec un fort recours aux espèces (tels que les établissements de nuit).
 
  • Abus de biens sociaux : le cumul de fonctions dirigeantes doit alerter
Autre délit faisant l'objet de soupçons de la part de ces professionnels du chiffre : l’abus de biens sociaux. Il consiste pour le dirigeant d’une société à utiliser, de mauvaise foi, les biens ou le crédit de la société contre l’intérêt de celle-ci.

Plusieurs indices doivent mettre la puce à l'oreille de l'expert-comptable ou du Cac, selon Tracfin : le "cumul de fonctions dirigeantes au sein de nombreuses structures à but lucratif et non lucratif", des "virements réguliers et significatifs depuis une société vers un actionnaire minoritaire", la "matérialité incertaine des prestations facturées pour des montants significatifs", ou encore le "maintien d’une créance pérenne au moyen d’une convention de compte-courant d’associé entre une société minoritaire et sa filiale".
 
  • Banqueroute et détournements
Les experts-comptables et les Cac sont également concernés par les risques de banqueroute laquelle consiste en des faits de gestion frauduleuse (détournement ou dissimulation de l’actif du débiteur, comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière, etc.). Le cas type analysé par le rapport est la succession d’infractions de nature pénale, comptable et fiscale commises par un dirigeant d’entreprises à travers ses sociétés.

Dans cette situation, les éléments qui doivent attirer l’attention sont "l’encaissement de montants en espèces ou cartes bancaires sans cohérence avec l’activité d’une société de holding", les "décaissements sous forme de retraits d’espèces de montant unitaire, de paiement par carte bancaire ou de virements de sommes rondes vers des comptes bancaires personnels", ou encore des "flux inter-sociétés sans motif économique réel".

Le rapport de Tracfin liste d'autres situations fréquemment rencontrées par les experts-comptables et Cac : faux et usages de faux dans le secteur de l’art ; corruption d’agent public étranger par une entreprise française ; détournement de fonds publics ; domiciliation fictive ; fraude aux finances publiques ; faux et usage de faux, manipulations comptables dans le cadre de l’obtention et de l’exécution des marchés publics ; déclarations fiscales incomplètes et abus de droit dans le cadre d’une rémunération par des jetons non fongibles ; ou encore rémunération déguisée.
 
(*) D’autres sources d'informations ont été prises en compte par Tracfin (renseignements financiers transmis par l’administration, les partenaires de Tracfin ou les cellules de renseignement financier étrangères ; transmissions de Tracfin aux juridictions et services de police judiciaire…)